vendredi 30 octobre 2015

Leviathan


Leviathan aurait vraiment mérité la Palme d'Or en 2014 ! Un morceau de bravoure, de tragédie Grecque ou plutôt Ukrainienne aux accents bibliques, où le drame inéluctable, fruit amer ou pourri de la victoire infâme du fort sur le faible, se noue sournoisement à l'abri des regards mais dans la lumière crue d'une justice aveuglée, aux ordres. La justice des hommes corrompus. Celle de Dieu n'est pas en reste et pour cause, "la vertu ne se décrète pas, n'exige aucune contrepartie, ton chemin de croix sera celui de la rédemption" susurre le croyant à l'incroyant jusqu'à ce que ce dernier courbe complètement l'échine et finisse comme ce squelette de baleine ou cette épave de bateau... Ironie du sort, sa maison sera finalement remplacée par... Une église. Habile façon de rappeler que les écrits saints sont aussi les premiers arguments commerciaux pour faire prospérer une foi dont les promoteurs (les mêmes qui détiennent le pouvoir) exploitent sans vergogne la fragilité d'hommes brisés. C'est ainsi que notre héros va payer sans broncher pour un crime qu'il n'a pas commis. L'enfer c'est parfois la religion. Tout dépend de ce qu'on en fait, de ce qu'on lui fait dire. La satire est l'une des redoutables armes de Leviathan, critique à peine voilée d'une religion d'Etat, d'une croyance érigée en cadre dogmatique qui va donner bonne conscience au bourreau lorsque le moment sera venu d'écraser le citoyen comme un vermisseau. C'est pourquoi derrière son ineffable noirceur le film réveille les consciences, nous ouvre les yeux, nous fait réaliser combien les donneurs de leçons, les chantres de la morale (religieuse en l'état) sont souvent les mauvais payeurs, parce que toujours du coté des puissants. Jamais des faibles... 

Du côté des influences, j'ai également pensé à la légende Arthurienne. Pas que pour ces décors grandioses qui finissent par nous convaincre que l'homme moderne est né quelques part sur les rives de la mer de Barents. Aussi pour le héros Kolia qui me rappelle cet Arthur de devoir ne voyant pas Guenièvre s'amouracher de Lancelot (pourtant son premier défenseur, l'avocat venu de Moscou) bien trop occupé qu'il est à préserver l'unité de son royaume : la maison héritée de plusieurs générations, les souvenirs, son sang. Sur cette terre du bout du monde on l'imagine bien s'écriant après le verre de trop "Une terre, un roi". Quel rôle pourrait alors jouer son fils, Mordred alias Roma, dans la décomposition du foyer familial ? Celui d'un adversaire en devenir ? L'un des responsables indirects de la tragédie à l'oeuvre ? Certainement et ces multiples grilles de lecture disent d'elles mêmes toute la grandeur du sujet, des sujets du film se débattant pour s'arracher au joug d'un destin malicieux, au sens de messager discret, invisible du "mal". Sorte de visiteur du soir indélicat et difficile à repousser comme lors de cette incursion nocturne et menaçante d'un maire aviné dans les retranchements de Kolia.

Alors certains auraient eu le malheur de comparer cet immense film à Winter Sleep ? Invraisemblable ! Leviathan se construit avant tout sur le réel, sur des personnages qui existent dans une géographie mais surtout dans une société, sous l'autorité d"une administration centralisée, tentaculaire (l'allusion du titre) dont les rouages létaux apparaissent rapidement. Des personnages y affrontent le vrai monde et ses vissicitudes, ses injustices comme une deuxième nature. Leviathan aborde d'ailleurs les grandes questions existentielles via le genre (toute la deuxième partie, la mort, le fil policier, le maquillage d'un meurtre froid, d'Etat, en meurtre passionnel, la reconstitution puis les conséquences sur la vie en morceaux de tous les personnages) alors que Winter Sleep malgré  l'intérêt philosophique et sociologique qu'il présente en reste sous la forme d'un huis clos au statut de pensum bavard sur les difficultés inaliénables du couple ou de la famille, le tout à travers le regard d'un homme embourgeoisé et perdu dans un projet littéraire d'état des lieux du théââââtre Turque, rien que ça  !!! Non, avec Leviathan, c'est bien le cinéma qui vient à notre rencontre, le vrai, total, à l'état brut et qui vous saisit à la gorge comme les goulées de Vodka coulant dans le gosier de personnages en sidération devant les coups durs, les vents contraires, mais qui tiennent debout, coûte que coûte, en essayant modestement de préserver ce qui subsiste en eux de dignité humaine. Un peu comme des roseaux qui plieraient sans rompre espérant sereinement le jour où le destin aura le bon goût de déraciner le chêne (le puissant, l'Etat, la religion) pour lui ôter un peu de son insolente superbe, de cette morgue hautaine et insultante qu'il étale depuis trop longtemps... 

jeudi 29 octobre 2015

Near Death Experience


Drôle (façon de parler) mais en regardant l'affiche j'ai d'abord pensé au Vélo de Ghislain Lambert parce que ce Houellebecq a comme ça la dégaine d'un Benoît Poelvoorde sous anxiolytique. Et c'est d'ailleurs le premier choc en découvrant le film. Michel Houellebecq, une voix, un texte, un corps, un visage, une présence. Tout cela. Il incarne littéralement le film à lui tout seul. Révélation sur un voyage au bout de soi-même qui tient sur les frêles épaules d'un seul homme.

Alors oui certains n'aimeront pas, c'est sûr, y verront comme moi des facilités ici et là (l'humour potache pas toujours bienvenu) mais franchement que le courant passe chaque fois que cette voix résonne sur une ombre portée ressemblant à la silhouette torturée d'un Nosferatu en plein jour, ou sur ce moment de questionnaire de call center récité platement, comme un robot, alors que la caméra s'enroule autour d'un fourmi torturée, le cul écrasé sur le bout d'un bâton... La magie opère souvent comme cela sur des musiques divinement choisies, l'émotion passe avec force chaque fois que l'on ressent les enjeux finalement existentiels du film... Puisqu'on est ici quelque part entre Gerry et Into the wild, mais là où ces derniers rataient complètement leur coup (trop théorique et stylisé dans un cas, trop puéril et adolescent dans l'autre), Near Death Expérience par sa poésie tour à tour désespérée, loufoque, par sa simplicité aussi parvient à montrer que la vie c'est aussi retrouver ces moments simples où l'on communie de nouveau avec le présent, le vrai moment présent. C'est peut-être là, dans cet éloge d'une lenteur délectable retrouvée, que se niche l'espoir jamais vaincu.

Pour prendre une dernière comparaison, le parallèle est assez évident avec Tree of life, cette tentative trop désincarnée de Malick de vouloir poétiser la vie, ou de chercher à percer les petits secrets si bien gardés de la beauté du monde. Là où ce dernier péchait notamment dans le choix d'acteurs bien trop "gravures de mode" et dans des voix off finalement assez creuses, Delepine et Kervern ont l'idée géniale de faire du visage si imparfait de leur personnage principal un paysage à lui tout seul, un territoire grouillant de poésie éclairée. Ils mettent surtout dans sa bouche des mots savamment choisis, de la matière littéraire quoi, de la vraie... C'est un des miracles du film qui parvient à nous donner le sentiment d'être un lecteur et de voir les visions de l'auteur, du narrateur s'incarner sur l'écran. Alors je vois venir certains qui me rétorqueront que c'est alors le Tree of Life du pauvre en somme... Et bien je crois que je verrais plutôt ça comme un compliment à vrai dire. Une fausse ambition dans le désert mais une vraie humilité appréciable. Near Death Expérience en regorge.

La dernière séquence, sublime, rappelle combien Houellebecq aura follement incarné 1h30 durant le spleen Baudelairien, cette petite tortue achevant à son rythme une course vitale contre la précipitation, contre toutes les vitesses mauvaises conseillères, puis qui franchissant la ligne fait sa confession détachée, sereine, libre, profonde, nous livrant le fameux secret du bonheur terrestre contenu dans le poème Elévation.

Comme ce dernier envol par delà l'asphalte brûlant d'une route de montagne. Encore ! Encore !

Elévation




Au-dessus des étangs, au-dessus des vallées,

Des montagnes, des bois, des nuages, des mers,
Par delà le soleil, par delà les éthers,
Par delà les confins des sphères étoilées,



Mon esprit, tu te meus avec agilité,
Et, comme un bon nageur qui se pâme dans l'onde,
Tu sillonnes gaiement l'immensité profonde
Avec une indicible et mâle volupté.



Envole-toi bien loin de ces miasmes morbides;
Va te purifier dans l'air supérieur,
Et bois, comme une pure et divine liqueur,
Le feu clair qui remplit les espaces limpides.



Derrière les ennuis et les vastes chagrins
Qui chargent de leur poids l'existence brumeuse,
Heureux celui qui peut d'une aile vigoureuse
S'élancer vers les champs lumineux et sereins; 



Celui dont les pensers, comme des alouettes,
Vers les cieux le matin prennent un libre essor,
- Qui plane sur la vie, et comprend sans effort
Le langage des fleurs et des choses muettes!




     Charles Baudelaire


mercredi 28 octobre 2015

Party Girl


Le risque avec Party Girl, on le sent dès les premières minutes c'est de sombrer dans la facilité d'un striptease géant (la célèbre émission belge) mais avec l'accent alsacien... C'est d'autant plus palpable que l'installation se fait in vivo dans un cabaret. autour d'un coin paumé après la frontière. Et ce qui n'arrange rien c'est que les premiers échanges, marqués par une vraie faiblesse des dialogues jusqu'aux présentations au sein de la famille de l'héroïne continuent de laisser à désirer. Le fait d'avoir à faire à des amateurs en matière de jeu y est probablement pour quelque chose et dessert le film, c'est en tout cas mon ressenti, dans un premier temps...

En revanche, malgré ce côté bancal que l'on retrouve aussi dans certaines séquences inabouties (je pense au pétage de plomb lorsqu'elle retourne au cabaret pour lequel une actrice aurait probablement mieux fait vivre la scène d'hystérie, je pense aussi à la scène tournée à la façon d'Une femme sous influence avec les copains du mari qui veut pas qu'elle fume... trop courte malgré un gros potentiel dramatique et burlesque), le film gagne en sympathie sur la durée. On est finalement traversé de beaux sentiments notamment lors de la séquence lumineuse et poétique des ballons dirigeables, puis lors de celle, simple et chaleureuse, du mariage (l'intervention émouvante des quatre enfants en particulier).

Malgré une narration prévisible et des dialogues, acteurs et séquences de qualité fort inégales, le film finit donc par être hyper attachant et s'achève en apothéose sur cette scène finale où l'on comprend qu'elle gardera fièrement et divinement son mystère, restant aussi insaisissable et indéchiffrable que ce visage qui exprimait si peu. A voir donc ce Party Girl d'autant que ça fait du bien tous ces visages inconnus et cette fraîcheur, cette innocence même que l'on sent chez les créateurs et qui est honnêtement vivifiante.

Her. Spike Jonze



Her est avant tout une intéressante incursion dans la comédie romantique par le très subtil truchement de l'anticipation. Riche idée mais au fond pas si neuve puisque les vioques dans mon genre ont eu le plaisir d'y goûter avec Une créature de rêve ou Electric Dreams dans les années 80 puis avec l'excellent Denise au téléphone dans les années 90. Ce dernier creusait d'ailleurs intelligemment le thème du repli sur soi par la faute des nouvelles technologies dites de communication. Syndrome paradoxal. Et stigmatisait par là un refus d'engagement en matière de sentiments, pathologie des temps modernes.

Outre cet argument, j'apprécie dans Her le fait que s'agissant d'un film US le puritanisme tellement ricain y trouve une illustration charmante dans la dématérialisation du corps de l'autre. Ou comment rendre palpable l'horreur qu'on peut en certaines extrémités y exprimer pour tout ce qui ressemble de près ou de loin à des poils ou à des sécrétions corporelles ! Une dématérialisation qui commence dès lors que l'on applique à l'autre sa propre grille d'exigences. Exemple avec cette très jolie scène de rendez-vous à l'issue duquel elle lui demande d'utiliser sa langue pour le baiser mais pas trop, juste un peu, à moitié... On n'est évidemment déjà plus dans la rencontre amoureuse mais dans l'exposition de son cahier des charges amoureux, dans l'étape "tue l'amour" où nos conditions rêvées sont posées au partenaire... Autre illustration symptomatique de cette recherche effrénée d'une forme maladive de perfection (évidemment pas de ce monde) : ce jeu video où l'on campe une mère qui pour marquer des points doit nourrir intelligemment ses enfants et les déposer à l'école avant les autres parents... Tant que Spike Jonze explore cette réflexion sur une idéalisation forcément déceptive du rapport à l'autre, tant qu'il évoque l'air de rien les difficultés du rapport amoureux propres à notre époque, le film fait mouche, il est même souvent poétique grâce à ses échanges délicieux entre un homme plutôt discret, timide, et une voix chaude.

Le film est moins convaincant sur d'autres aspects, notamment sur la personnalisation de l'Ordinateur qui dans son phrasé comme dans le contenu de ses propositions semble trop souvent prisonnier de formules, d'incantations un peu vaines, ne se targuant que de préoccupations très, trop humaines "Je sais bien que je n'ai pas de corps" ou "on fait moins l'amour ces derniers temps...". Déclamations qui tombent à plat parce qu'on saute artificiellement l'étape de la conscience de soi, du questionnement métaphysique. D'autres scènes comme celle du pique-nique par exemple ne fonctionnent pas beaucoup plus ("et alors qu'est-ce que tu aimes chez Samantha ?", question posée par le couple d'amis ou "Tu te tapes ton ordi ?" réaction outrée de l'ex adulée) du fait de dialogues qui ont quelque chose de trop littéral... Ce sont des phrases qui pourraient se révéler drôles dans du théâtre de boulevard ou dans une vraie comédie burlesque mais qui fonctionnent beaucoup moins dans ce registre poético-réflexif fait de sentiments (vrais ou simulés d'ailleurs), de questionnements sur nos addictions, sur nos manques affectifs, et sur les solutions au rabais envisagées pour contourner une difficulté fondamentale à nous engager... Cela procède je crois d'un décalage pas toujours heureux entre l'univers et ce qu'on veut faire dire aux personnages.

Mais le vrai tournant raté du film me semble surtout se situer autour de la fameuse colère de Samantha ("Ta gueule" ose-t-elle même s'écrier). A partir de là, je rêve de basculer dans quelque chose de beaucoup plus angoissant. Du côté de ces atmosphères étranges où tout devient possible. Parce que le sentiment amoureux peut faire faire n'importe quoi. Précisément. Je me dis qu'on pourrait alors découvrir le vrai visage d'un gars inquiétant qui parle tout seul, qui cause aux arbres ou avec sa poupée gonflable... Cela pourrait révéler un personnage sous influence aussi effrayant que l'obsessionnel metteur en scène de ses fantasmes dans Le Voyeur. Mais on pourrait tout aussi bien montrer comment naît la relation abusive dans laquelle la voix va se révéler envahissante, pressante, manipulatrice, jouant avec plusieurs coups d'avance (des milliers peut-être) et pour cause, elle est un ordinateur... Elle peut alors apparaître comme menace multiple (une voix d'homme, d'enfant, un cri d'animal) et omniprésente, elle peut s'immiscer dans sa vie privée, dans ses choix, le faire chanter, elle pourrait même le mettre en concurrence avec l'un de ses fameux 641 autres amants (comme elle l'évoque vers la fin) mais rien de tout ça, on reste pour finir sagement dans une relation qui s'étiole (comme notre attention) pas vraiment de son fait à lui (le personnage central est d'ailleurs trop mou de ce point de vue) mais par sa volonté à elle de s'émanciper... S'émanciper de qui, de quoi ? Ce n'est pas clair... Pour aller où ? Ce n'est pas clair non plus. Cela affadit la seconde partie qui finit par ronronner malgré de belles idées comme le savoureux plan à 3 ou les vacances en amoureux à la montagne alors qu'il part tout seul !!!

Restera donc le beau message que véhicule le film sur ces vies par procuration que favorise un soit disant progrès (son métier à lui l'illustre bien d'ailleurs, écrire les histoires des autres, être la voix des autres) qui finit par nous renfermer sur nous mêmes plutôt que de nous ouvrir sur le monde. Mais  Denise au Téléphone ne le faisait-il pas mieux passer ce message parce que justement de façon plus cruelle, froide et cynique et sans pathos ? La naissance du sentiment amoureux dans Her, parce quelle a justement lieu, aurait probablement mérité d'être le point de départ d'une histoire beaucoup plus irrationnelle, inattendue, frissonnante, humaine comme seul l'amour sait en créer... C'est ce qu'on pourrait appeler le bug sentimental du film !


dimanche 25 octobre 2015

Winter Sleep. Nuri Bilge Ceylan


Au départ je me réjouis de découvrir une sorte de Shining version film d'auteur à la sauce anatolienne... Un double homicide se prépare-t-il dans cette maison troglodyte de Cappadoce ? Les images sont belles et froides. Les secrets de famille semblent partout. On est saisi comme le touriste par la beauté de l'endroit. Puis rapidement j'ai pensé à l'adaptation filmique d'une pièce de théâtre (le personnage principal n'est-il pas lancé dans une réflexion de fond sur le théâtre de son pays, la Turquie ?). Et c'est un des soucis à mon sens. Beaucoup de séquences interminables où un simple champ contre champ vient mettre en scène des échanges entre frère et soeur, mari et femme, soeur et femme, hôte et hôtelier... Au théâtre, ça donnerait probablement quelque chose de fort en plusieurs actes et deux personnages à chaque fois, avec la nécessité de faire vivre - de façon organique - sur les planches ces joutes bien souvent d'ordre intellectuel... Mais à l'écran le dispositif est souvent minimaliste, les personnages se déplaçant très peu, vissés dans des fauteuils, enfoncés dans des canapés, se tournant parfois le dos et parlant beaucoup... Beaucoup trop ! Je comprends bien l'idée que les personnages soient comme écrasés par cette nature toute puissante et muette autour, qu'ils étouffent sous les parois naturelles de cette maison austère, je vois l'intérêt de les réduire à l'état de grain de poussière dans le décor et de rendre ainsi dérisoire leurs petites existences  leurs menus bavardages, mais cela a justement l'effet d'accentuer la torpeur, l'état de dépression voire d'indifférence chez le spectateur qui finit par attendre la fin de chaque nouvel acte (si théâtral) souvent filmé en quasi champ contre champ...

Un exemple de réussite malgré tout ? le côté bavard qui passe hyper bien dans la scène de la cuite parce que l'état des personnages justifie une libération brutale de la parole, sans filtre... Mais au lieu d'exploser au coeur du film comme une exaltation verbale nécessaire, elle n'apparaît hélas que comme un énième wagon de verbiages venu s'emboîter à la suite de tant d'autres... Problème de dosage et de relief dont le film manque de ce point de vue.

Par ailleurs je trouve assez passionnants tous les échanges et non dits révélant les tensions familiales, les folles contradictions des personnages, et même les quelques dissertations philosophiques autour de l'oisiveté mère de tous les vices ou du pouvoir de l'argent (au coeur du film) qui définit et redistribue les rapports de force d'une société... Mais voilà, cela reste des conversations de salon souvent réservées à des milieux autorisés et le film finit par avoir quelque chose de la mentalité bourgeoise et agaçante du personnage principal. Et puis Winter Sleep c'est par ailleurs 1h30 de trop au bas mot (qui est le monteur ? Quelle a été sa contribution éclairée au projet ? ) et malheureusement pas assez de virtuosité du côté de la mise en scène (je pense notamment au talent à la touche unique d'un Peter Greenaway) pour faire joliment passer la pilule. Ce qui s'agissant d'un résultat trop immobile à l'écran, n'arrange rien à l'état d'un spectateur devenu malgré lui marathonien de la lutte contre le sommeil... Partant de là, malgré quelques très beaux moments, Winter Sleep est une Palme d'Or besogneuse, longuette, assez incompréhensible pour ma part et où il est finalement beaucoup question de théââââtre et de joutes intellectuelles assez vaines...   

samedi 17 octobre 2015

Jersey Boys


Malgré ce qui s'est écrit ou dit à son sujet, Jersey Boys n'est absolument pas un petit film lambda et sans profondeur de Clint Eastwood. Encore moins un film de commande, expédié à la sauvette, c'est au contraire derrière un académisme joliment troussé une oeuvre personnelle qui poursuit le travail d'un Clint Eastwood désireux de creuser encore et toujours le sujet de la famille qu'on se fabrique (Million Dollar BabyGran Torino...) et qui vaut souvent bien plus que les liens du sang. La dernière confession face caméra de Frank Valli, merveilleusement réconfortante, ne dit pas autre chose : "Cette nuit-là sous ce réverbère, quand nous avons commencé à chanter ensemble, il n'y a rien eu de mieux après"... Et non, Jersey Boys n'est pas un biopic quelconque, c'est le prétexte rêvé pour un  hymne vibrant à la mélancolie, à l'amitié toute puissante malgré les écueils de l'existence, les tensions, les différences qui sont pourtant palpables entre les 4 garçons. 4 approches, 4 tonalités, 4 saisons auxquelles Clint donne intelligemment la parole via des apartés bienvenus.

Côté émotion, on est également servi. Peut-être parce que l'une des plus belles scènes d'amitié au cinéma se trouve à mes yeux dans The Deer Hunter, lors de ce mariage où les meilleurs amis du monde entonnent I love you baby avant que la guerre du Vietnam ne viennent les faucher ! Les amoureux du film de Cimino ne s'y tromperont pas. Et le choix de Christopher Walken n'est probablement pas anodin. Quand enfin dans Jersey Boys, Valli (encore tout plein de la tristesse et du deuil de la mort sa fille) fend l'armure et déclame à fleur de peau Can't take my eyes off youl'instant est pour moi un moment de grâce totale. J'avoue en avoir versé plus qu'une simple larme.

La dernière fois que j'avais ressenti sur le sujet une telle chaleur c'était devant Stand By Me voire The CommitmentsJersey Boys est donc bien avant tout un film sur les meilleurs copains, sur des valeurs qui paraît-il se perdraient de nos jours. Classe, discret, droit, Frank Valli l'est mais plus encore incarne cette valeur suprême de la fidélité à ceux qui ont fait de lui ce qu'il est devenu. La mafia est au passage décrite comme un lieu où la confiance est possible, réciproque et où les mots seuls peuvent valoir promesses tenues. Intéressante approche là encore, loin des clichés habituels sur le sujet. Très belle scène au passage que celle où Walken pleure en écoutant Valli chanter... Un chanteur à la voix d'or, qui à l'image du film est Just too good to be true !

mercredi 14 octobre 2015

Saint Laurent. Bertrand Bonello


Bertrand Bonello a incontestablement du talent pour soigner son cadre, reconstituer des époques en y intégrant des musiques joliment choisies, parfois même anachroniques. En revanche, dans Saint Laurent , on se demande rapidement s'il ne s'est pas pris au piège du "je veux raconter l'homme derrière l'icône, je vais faire un film académique tout en accouchant d'un film d'auteur, personnel…". Premier problème : l'acteur  principal, tellement appliqué dans sa volonté de recréer le personnage qu'il finit par ne donner vie qu'à une silhouette, quasiment un logo, une marque en trois lettres… Ce qui achève de nous désintéresser d'YSL alors qu'on se met inconsciemment à chercher en permanence la petite fausse note, l'intonation forcée par ici, le dos un chouia trop cambré par là... C'est quand même ballot. Je me demande si à ce petit jeu il n'aurait pas été plus intéressant de s'éloigner davantage du vrai visage d'Yves Saint Laurent en choisissant l'acteur (comme dans l'autre film porté par un Pierre Niney qui justement est peut-être plus dans une création que dans l'agenouillement, dans la posture, toujours vaine).

Le deuxième point négatif, c'est évidemment qu'on n'apprendra rien de la genèse de l'artiste, de ce qui l'a engendré, des rapports avec ses parents, avec sa famille (dont on ne sait à peu près rien). La mystère demeure et l'on ne découvre que les coulisses attendues de la carrière d'un homme ayant du génie mais rongé par la timidité, les drogues, et les quelques hommes dont il se sera épris sur le chemin… Programme évidemment tristement attendu. On retient donc au final assez peu de ce film dont il reste une certaine élégance confinant parfois au maniérisme, des musiques chaudes, mais de vertige et de plongée dans l'âme d'un artiste finalement si peu.        

mardi 13 octobre 2015

Le loup de Wall Street. Martin Scorsese



Mais jusqu'où nous mènera la déchéance de ScorseseLe Loup de Wall Street est d'un premier degré, d'une vulgarité "pipi popo coco pupute" qu'on finit par se demander si le grand Martin n'est pas entré dans une phase régressive comme en connaissent les enfants autour de 4, 5 ans. En plus d'être ras la moquette côté narratif (rien trouvé de mieux qu'un voix off qui paraphrase tout ce qu'on est amené à voir à l'écran) ou en matière de message à faire passer (le capitalisme aurait été érigé par des demeurés - ce qui nous les rend presque sympathiques avec quelques valeurs comme l'amitié, le comble) il y a dans le film un état d'excitation permanent (de la cocaïne au blow job "glissé roulé") qui frise l'insupportable pour les yeux et les oreilles… Raté monumental parce que caricatural et sans la moindre hauteur de vue mais Scorsese n'en est plus à son coup d'essai côté foirage total et dénué de tout génie. Il n'est plus que l'ombre de lui-même et pour dire le fond de ma pensée, ça fait mal au derche...

jeudi 8 octobre 2015

Under the Skin. Jonathan Glazer


Je ne sais pas si l'une des scènes inaugurales (celle avec la fourmi) est un clin d'oeil à Phase IV mais je trouve que le film dans le choix de la musique et des visions délirantes ou de l'intro psychédélique qu'il propose emprunte beaucoup à l'univers d'un Saul Bass ou d'un Nicolas Roeg. Le film aurait d'ailleurs certainement pu s'intituler La femme qui venait d'ailleurs. Côté trip sensoriel, sens de l'épure et mise en scène très maniériste, Under the Skin est objectivement une réussite qui mérite le détour.

Le problème viendrait plutôt de tout ce qu'il ne dit pas. Laisser dans le flou une partie non négligeable de la narration constitue un risque évident. Celui de perdre son spectateur. Les ellipses et autres non dits peuvent évidemment fonctionner mais dans ce cas précis pas vraiment. Elle a tué une femme pour revêtir ses vêtements mais a t-elle tué une femme pour revêtir sa peau ? On n'en saura rien malgré une scène finale qui le laisse supposer. Fantasme-t-elle ou tue-t-elle vraiment les hommes qu'elle rencontre ? Et si oui, en reste-t-il trace quelque part ? Si elle est capable de causer autant de dégâts autour d'elle pourquoi paraît-elle si fragile à l'heure de se consumer dans la neige sous la menace d'un énième énergumène du sexe opposé...

Questionnement légitime que le spectateur est en droit de soulever quant aux volontés dernières du réalisateur : veut-il offrir une métaphore de la difficulté pour une femme d'affronter le regard des hommes tant qu'elle est vierge et "encore étrangère à son propre corps" ? La scène finale devient ainsi le conte dans la forêt qui la voit se faire dévorer toute crue par le "grand méchant loup"... Ou le réalisateur cherche-t-il à nous parler de la nature humaine, de la méchanceté propre à l'homme dès qu'il est question d'altérité ? Une altérité qui serait vécue comme une menace, jamais comme une chance ? On ne sait rien vraiment des desseins du personnage principal et ce faisant notre patience et notre attention finissent par s'étioler malgré une poésie indéniable, et un dispositif qui peut rappeler celui d'un grand plasticien voulant jeter ses saillies visuelles énigmatiques sur une grande toile blanche (comme lors de la scène d'ouverture) ou noire (comme lors des ingestions d'amants dans une sorte de liquide amniotique).

Under the Skin est donc un objet fascinant par beaucoup d'aspects mais se refuse dans le même temps à livrer des clés qui peuvent du coup le faire passer pour une petite arnaque joliment troussée. "Je n'en dis pas trop, c'est plus élégant, à vous de vous faire votre religion"… 

Pour prendre une comparaison qui me parle, quand Under the Skin s'organise autour d'un paraître glacial (toute la mise en place, visuellement), du refus de la rencontre des corps, de l'échange de salive, de l'effusion de sang, Trouble Everyday de Claire Denis se coltinait divinement l'orgie de chair et de sang pour satisfaire l'appétit d'ogresse de l'héroïne (dans Under the Skin on se demande d'ailleurs si elle tue pour se nourrir, aucune piste d'aucune sorte ne nous est livrée sur le sujet). Bref, il y avait dans le film de Claire Denis de l'organique, une sensualité viscérale et dangereuse autrement plus interpellante. Parce que les dégâts étaient visibles et causés par une Béatrice Dalle rarement aussi inquiétante. Pas un hasard d'ailleurs si le meilleur moment de Under the Skin est celui où la chair de l'héroïne "devient faible" c'est à dire après la tentative avortée d'amour physique.  Question de choix mais je préfère le parti pris de s'abandonner totalement à son sujet que de tourner indéfiniment autour… Reste qu' Under the Skin est une sacrée curiosité sur le plan visuel et sonore. Et sensoriel.

mercredi 7 octobre 2015

Ni le ciel ni la terre. Clément Cogitore


Je comprends bien qu'on puisse s'enthousiasmer devant "l'audace" d'un projet trans-genre qui commence comme un film de guerre, se poursuit comme un film d'épouvante (presque de possession, à la lisière du fantastique) avant de s'achever comme un film sur l'isolement, l'embrigadement mental et la folie qui peut en découler…

Et je reconnais que le film regorge d'idées intéressantes, se targue aussi de jolies références (The Thing avec la scène inaugurale du chien) mais il y manque avant toute chose un scénario nom de nom… La trame du film n'est objectivement que le sujet brûlant d'un court-métrage tout au plus. Du coup au bout de 30 minutes on regarde sa montre en ayant le sentiment d'être là depuis 1h45… Et il ne s'est encore rien passé. Ou si peu.

Autre problème à mes yeux et plus embêtant : les personnages qui sont de vraies caricatures sans relief, sans passé (peut-être William mis à part)… Ils  ne sont que ce qu'il semblent être, que ce que "leur uniforme" dit pour eux. C'est à dire des silhouettes en armes, muscles et camouflages. Cela contribue à un jeu approximatif, une difficulté à les faire exister les uns par rapport aux autres… Les motivations du chef deviennent très vite floues, en tout cas pas faciles à déchiffrer. On sent d'ailleurs un Jérémie Rénier (si bon d'habitude) pas très à son aise pour trouver la bonne carburation, l'intonation juste. Bref ça ne tient pas la distance de ce côté là non plus. Or l'interprétation m'aurait semble capitale (repensons juste à Valhalla Rising ou Aguirre dans cette veine "démentielle" pour la vraisemblance de laquelle les acteurs doivent être en toute première ligne, habités).

Dernier point : cette volonté (louable) d'opposer le ciel et la terre, les bonnes intentions et l'enfer, la raison et la foi, la technologie souveraine et le caractère inexplicable de ces disparitions… Bien sûr, pourquoi pas ? Mais chaque fois que cette dialectique s'étale d'elle-même par une voix off (celle de la fin, trop littéraire) ou dans la bouche d'un personnage (celui effrayé qui dit à son chef groggy sa peur que le monde soit contaminé…), elle le fait de façon trop littérale et didactique. On nous explique à nous le spectateur l'anecdote de la sourate, le rêves prémonitoires des 2 personnages principaux, la localisation de la grotte, on nous montre dans le même mouvement par des plans univoques l'incrédulité du soldat, sa foi dans le rationnel, dans le tangible et cette absence d'ombres, de nuances, d'une belle et grande dimension allusive appauvrit le film qui devient bêtement démonstratif et gauche.

Restent des séquences assez réussies (celle très brève de la danse sur un morceau de techno pour évacuer la tension, toutes les séquences de nuit en infra rouge à la pêche aux inquiétantes tâches de lumière, l'irruption nocturne d'un motard tout droit sorti de Mad Max ou du Dernier Combat, la rencontre en terrain neutre des ennemis qui pactisent pour retrouver les leurs, enfin la réflexion sur un code d'honneur qui obligerait le "chef" à maquiller des disparitions en bavure militaire justifiant au passage le sacrifice de 4 pauvre moutons qu'ont rien demandé à personne)… Tous ces petits moments valent le détour parce qu'ils distillent une tension et une étrangeté bienvenues. Mais le problème vient de ce que chacun d'entre eux vit seul, ne fait jamais corps avec les autres pour accoucher d'un film.

Voilà, pourquoi je n'ai pas réussi (comme apparemment beaucoup de critiques) à m'enflammer pour un film qui reste malgré ses jolies promesses, ses quelques pépites éparpillées ici de là, un coup de pioche assez vain dans un désert de pierres.

samedi 3 octobre 2015

Ennemis intimes. Werner Herzog


Ce documentaire est franchement un "must see", surtout la première partie qui revient sur les conditions de tournage dantesque d'Aguirre puis de Fitzcarraldo.

Le plus fort à mes yeux c'est cette certitude acquise avec Ennemis Intimes qu'un film doit se réinventer en live, ne doit vraiment commencer, naître que sur le tournage avec ses incertitudes, ses zones d'ombre, ses questions, une gestation chaotique.

Une magie vaudou, un enseignement biblique qui semblent s'être perdus au fil du temps, le "set" devenant trop souvent le moment où l'on ne fait que retranscrire sagement et fidèlement les informations contenues dans un scénario, dans son storyboard. Or c'est oublier que le film est un être vivant, mouvant, que la surprise, le "transport amoureux" doivent y survivre au moment où le mot " Action" résonne aux oreilles des petites particules élémentaires impliquées dans le processus de création. Werner Herzog avait compris tout cela. Intimement.

Le documentaire rappelle également qu'un acteur c'est avant tout une nature, un monstre qui donne tout, qui y laisse parfois, souvent même, sa santé, ses forces vives, son âme… Aguirre apparaît en cela comme la parfaite épure du télescopage de l'ego surdimensionné d'un acteur habité, démoniaque, tyrannique, avec la nature hostile, féroce, mystérieuse qui l'a fabriqué. Le film devient une gigantesque leçon d'humilité à l'adresse de son acteur principal. Fabuleuse mise en abime...

vendredi 2 octobre 2015

Deep End. Jerzy Skolimowski


Belle séquence finale travaillée comme l'happening artistique d'une galerie branchouille du Swingin London. On sent que Londres est alors la capitale mondiale de la pop et de la mode (ces couleurs criardes, colorées, jamais de mauvais goût). Une époque dont c'était probablement l'étendard : Faire de la vie, de sa vie, un art consommé, déjà posthume.

Je comprendrai d'ailleurs que des spectateurs, dans la recherche d'émotions grandes et pures comme l'appel du grand amour peut en susciter, se retrouvent gênés par le "dispositif" arty du film (la silhouette en carton puis la bague dans la neige puis la piscine qui se remplit puis les pots de peinture rouge qui s'y déversent…) qui peut légitimement manquer de coeur et de spontanéité parce que finalement plus écrit qu'il n'y paraît au premier regard.

Mais à y repenser, je trouve que cette distance, ce côté poseur, glacé, colle bien à la psychologie troublée du jeune héros. Car quoi de plus propice à la naissance du désir de créer, de l'élan sexuel, du tremblement amoureux vers l'autre que l'adolescence ? De ces réflexes un peu gauches qui nous rendent possessifs, inadaptés à l'autre, serrés dans une idéalisation mortifère. Alors oui, Deep End saisit parfaitement l'air du temps orageux de cet âge ingrat et de ses lubies charnelles autour d'un corps, d'une femme désirée qui reste encore à l'état d'"objet". En cela, Skolimowski a tout bon.



jeudi 1 octobre 2015

Les rêves dansants


Documentaire qui a le mérite de mettre "la Daaaanse" (à remettre ici dans la bouche de ces gens qui déclament pompeusement et avec bien trop de sérieux "le Théâââââââtre") à hauteur d'homme et de femme sans prédisposition ni appétit particulier pour cet art un chouia élitiste ! Cette idée de confronter la grande Pina Bausch à des étudiants profanes et n'ayant aucune attirance particulière pour la Danse fonctionne et donne à cette longue préparation quelque chose de rafraîchissant qui nous permet de nous identifier, d'avoir de l'empathie pour tous ces jeunes...

Et franchement, au-delà de nous permettre de comprendre le contenu du travail immense de mise en scène et de direction d'acteurs qui précède la grande première (belle séquence finale où tout est enfin là, d'un bloc), les Rêves dansants se révèle être un miroir assez fidèle des problèmes et autres angoisses de l'adolescence, échos du mal-être propre à cet âge, d'une certaine difficulté pour ces jeunes à s'affirmer dans un monde qui les a précédé et qu'ils n'ont pas choisi.

En même temps, cette absence de solennité peut aussi avoir l'effet inverse en transformant le carrosse du" bouquet final" en citrouille informe, je parle de ce qui peut apparaître comme une kermesse estudiantine de fin d'année quelconque. On pourra d'ailleurs déplorer sur ce terrain, celui de la trivialité, un regard finalement assez banal de la caméra, sans véritable intention. Bref, Les Rêves dansants auraient l'immense mérite de rendre un art pour initiés accessible par le biais d'une mise en scène paradoxalement pas assez gracieuse ? Chacun y verra midi à sa porte et c'est très bien comme ça.