samedi 20 avril 2024

Killers of the flower moon


 La dermière image ? Probablement la séquence nocturne juste après le dynamitage de la maison de la soeur de Molly. Belle atmosphère crépusculaire. Presque fantastique. Qui reste en mémoire. D'ailleurs les scènes de flammes dans la nuit m'ont rappelé la beauté  irradiante des Moissons du ciel (Malick).

Ca fait quelques films que je m'acharne à répéter que le Scorsese qu'on a aimé n'est plus là et que ça ne date pas d'hier. La caméra tourne mais d'âme, d'émotion vraie, vous ne trouverez pas. 

D'abord quel intérêt d'étirer un film sur près de 3 heures ? Surtout quand le rythme est aussi monocorde, le style aussi académique, l'intrigue aussi plate... Je veux dire que tout ce qu'on voit rapidement ne fait que se répéter inlassablement jusqu'à l'épilogue. Aucune surprise. Tout est donné d'entrée. "On va tous les spolier via des arnaques à l'assurance, à l'héritage avec de crapuleux empoisonnements et assassinats à la clé". Voilà le programme. Maintenant on va vous dérouler le programme pendant plus de 3 heures. Indigestion quand tu nous tiens...

Le seul piquant résidait peut-être dans l'ambiguité du personnage campé par Di Caprio et sa relation (sincère ?) avec Molly. Mais c'est trop peu et surtout jamais développé. Tellement peu développé qu'on ne ressent rien quand ils perdent leur fille (???). Repensons simplement ici à la douleur ressentie lorsque le personnage campé par Ryan O'Neal dans Barry Lindon perd son fils... Ici pas plus d'émotion pour la fille que les soeurs de Molly, sa mère, ou même la longue maladie (provoquée) de Molly... Le film anesthésie patiemment son spectateur.  

Ce qu'on peut bien sauver de façon certaine dans Killers of the flower moon, c'est son titre bien sûr, beau comme c'est pas permis, mais aussi et surtout  le devoir de mémoire qu'il légitime. Mais sorti de l'intention, il me semble clair qu'en pareil projet il eut fallu mener l'intrigue du point de vue de l'enquêteur du FBI (personnage ici secondaire et probablement beaucoup plus intéressant à suivre y compris dans ses motivations et devoirs). Dévoiler ainsi l'horreur au fil de son enquête. Un peu comme Alan Parker le fit dans Mississipi Burning (sur une thématique pas si éloignée). Je crois que cela aurait permis au spectateur de découvrir progressivement la machination diabolique en commençant par les apparences d'un monde où la cordialité et la cohabitation entre les communautés semble toujours à première vue harmonieuse... 

Le problème ici est de toute façon multiple. J'ai parlé de cette intrigue qui déroule son programme sans aucune aspérité, de façon lisible et prévisible. Bêtement linéaire. Les acteurs sont par ailleurs en cause. Ils en font 100 fois trop. Je pense surtout à Di Caprio (pourtant génial, peut-être le meilleur de sa génération) qui cabotine à outrance, singeant le plus souvent le Brando du Parrain et sa bouche pleine de je ne sais quoi... Ayant toujours le sourcil froncé, le regard soucieux avec ce côté chien battu "je souffre, je suis tiraillé, j'aime Molly mais j'aime mon oncle, je participe à des trucs horribles mais il faut le faire, je suis un homme de devoir"... De Niro n'est pas en reste. Mais pour une raison simple. Les personnages sont monolithiques. L'un obsédé par l'argent est un pourri sans la moindre étincelle d'humanité jusqu'au bout. L'autre est un lâche, amoureux mais perdu et qui se laisse facilement manipuler. Il n'ouvre les yeux que lorsqu'il est finalement pris la main dans le sac... Tous deux sont énervants au possible. La durée y est pour quelque chose évidemment. Impossible de s'attacher. Comme il est impossible de s'attacher à Molly et sa mollesse de tous les instants. Qui ne finit par en vouloir à son mari non pas pour son implication directe dans la mort de sa mère, de ses soeurs et de son ex mari mais seulement après le procès quand elle comprend que l'insuline n'était pas son seul remède quotidien... Pauvre petite oie blanche. Quelle zénitude ! Un somnifère à elle toute seule. Et dans sa communauté, personne pour s'indigner, la défendre, se rebiffer ?   

Voilà donc comme d'hab j'ai envie de dire (en gros depuis A tombeau ouvert puis Gangs of New-York ) un film indigeste de Scorsese qui finalement ne fait que reproduire avec platitude et moultes clichés le schéma des Affranchis. Enlevez l'univers des indiens du vingtième siècle naissant, mettez des mafiosis avec De Niro en Parrain grimaçant et Leonardo Di Caprio campant Ray Liotta en fils spirituel qui finit par trahir pour sauver sa tête. Et nous y voilà...

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