samedi 6 mars 2021

Tout en haut à gauche de l'étagère. Stephen Wright et Jim Nisbet.

Un jour que je bossais sur les sorties DVD de StudioCanal et que j'étais allé rencontrer Jean-Pierre Dionnet dans son antre (époque du fantastique La Mélodie du Malheur de Takashi Miike) , j'avais adoré la façon dont il classait ses films sur une haute étagère calée sur tout un pan de son mur... A chaque nouveau visionnage il glissait le DVD à l'endroit qui lui semblait correspondre à la place qu'occupait le film dans son coeur. Ainsi, contrairement au classement des rayons de la FNAC où tu cherches par genre puis par ordre alphabétique, chez Jean-Pierre, il fallait lui emprunter les films que tu n'avais pas encore vus et qui se trouvait tout en haut à gauche, et ne reluquer ceux qui se trouvaient tout en bas à droite que pour comparer vos détestations et connexions possibles (qui se font évidemment sur les accords et les désaccords). Au milieu de l'étagère dormait le ventre mou, souvent de l'académique, du réchauffé, du formaté.

J'y repense souvent. J'ai aussi depuis l'époque mon petit panthéon personnel de livres notamment (comme de musiques ou de films naturellement) que je rêverais de voir un jour adaptés au cinéma...

Aujourd'hui, en voici deux qui trônent en haut à gauche de mon étagère rêvée et qui méritent d'être racontés, lus, et j'espère un jour adaptés ! Par Nicolas Winding Refn, ça aurait de la gueule....     

     GOING NATIVE (ETATS SAUVAGES) Stephen Wright



Le vrai choc de la littérature contemporaine made in US. J'avais aimé, adoré le Bret Easton Ellis d'American Psycho ou de Lunar ParkDenis Johnson et son fabuleux recueil de nouvelles Jesus Son, mais à mes yeux rien ne vaut l'indépassable Going Native, malheureusement trop méconnu.

Le livre de Stephen Wright lie un style singulier inimitable, foisonnant, à une narration en tranches de vie qui les unes avec les autres finissent par composer un Road Movie existentiel, une parabole universelle sur la violence ordinaire.

J'en retiendrai quelques morceaux d'anthologie dont cette rencontre improbable entre deux tueurs en série puis sur le tard une soirée aseptisée qu'organisent dans leur pavillon cossu - agrémenté d'objets d'art primitif beaux sous tous rapports - un couple de bobos américains racontant avec passion leur équipée roots - pas un voyage organisé, très peu pour eux - au coeur de l'Amazonie pour finir par tomber nez à nez avec un portrait de Jack Nicholson. Moments et bouquin d'éternité à découvrir d'urgence !

SOUS LE SIGNE DU RASOIR (Jim Nisbet)


Je ne comprends pas que le chef d'oeuvre de Jim Nisbet n'aie jamais fait l'objet d'une adaptation au cinéma. Du traumatisme originel à la libération finale, un roman désabusé, sombre et cynique, qui sous des faux airs de film noir revisite divinement la notion de "happy end". Un style pas facile mais, passée la barrière de corail, la lecture n'est plus seulement clémente, elle devient ce voyage sans retour sur des terres anxiogènes, rougeâtres mais néanmoins hospitalières.

jeudi 4 mars 2021

Night train. Nick Tosches. A quand une adaptation au cinéma ?

 



Ce fut une de ces rares nuits électriques au coeur des années 80. Les voix de Jean-Claude Bouttier et Christian Delcourt - timbres enveloppants, couleurs désormais familières - s'élèvent dans le ciel de Las Vegas comme dans celui de mes vingt ans. Pour s'y installer, ne plus en repartir.


En matière de Boxe anglaise, elles resteront comme des madeleines sonores de Proust. Et de ma passion pour ce sport, je me souviens parfaitement comment la mèche s'est allumée : devant l'épique Thomas Hearns - Marvin Hagler. Les rocailleux "wooooow" d'un Jean-Claude extasié résonnant à chaque coup de boutoir du "Marvelous" en réplique aux vénéneux pistons de "The Hit".

Le début d'un lent processus, délectable et minutieuse dévoration d'un nombre incalculable de matches. Au terme de ce travail de fouille, notamment dans les archives de la catégorie reine (les poids Lourds), j'ai pu discerner les imposantes silhouettes des futurs locataires du célèbre Boxing Hall of Fame, comprenant enfin - aucune explication rationnelle ne saurait mieux le faire que la vague d'émotion suscitée - d'où venait qu'on baptisa ce sport respectueusement et amoureusement le Noble Art.

J'en ai alors passé des soirées à me demander qui de Jack JohnsonJack DempseyJoe LouisRocky MarcianoSonny ListonMuhammad AliGeorges ForemanMike Tyson ou Lennox Lewis avait été le plus grand ?


Et puis je suis tombé sur une bénédiction de livre : Night train de Nick Tosches.


Biographie d'un combattant hors normes - et par son physique et par son destin chaotique - condamné depuis sa naissance jusqu'à sa mort dans des circonstances troubles à Las Vegas en 1971, ce petit bijou est aussi l'occasion d'une belle plongée dans l'Amérique des années de ségrégation sur le rythme épileptique du Night train transfiguré par James Brown. Un agitateur de tripes, un derviche tourneur de cerveau qui finit par ouvrir les yeux sur ce qu'on pourra désigner comme une terrible injustice de l'Histoire de la Boxe. Difficile avoir l'avoir lu de ne pas penser que Sonny Liston fut bien le plus grand boxeur de tous les temps.


Car au fil d'une contre-enquête passionnée, cette analyse en profondeur de 2 célèbres combats ayant opposé Sonny Liston à Cassius Clay / Muhammad Ali met en lumière les circonstances pour le moins opaques dans lesquelles ils se conclurent. Le deuxième affrontement consacrant le fameux phantom shot, dont même le ralenti ne permit jamais de voir ce qui avait réellement mis knock-out l'indestructible Liston (inspirant à l'époque une terreur absolue à tous ses adversaires).

Au terme de 2 matches probablement truqués, le grand Sonny aurait donc, sous la pression d'adversaires insaisissables, volontairement saboté sa propre légende, pour finir oublié, emportant avec lui son secret à seulement 39 ans.

Il y a dans ce destin, tous les ingrédients d'un phénoménal personnage de cinéma. A quand une belle et grande adaptation cinématographique ?


Pour les amoureux de la boxe anglaise et pour tous les autres, les curieux de ce que nous dit la petite Histoire, de ce que retient la grande, il faut sans attendre dévorer Night train dont la musique (préférez les versions d'Oscar Peterson et James Brown) vous accompagnera longtemps, bien longtemps après avoir refermé ce merveilleux livre.

"Un livre fantastique sur une vie qui a commencé dans les ténèbres et n'a cessé de s'y enfoncer jusqu'à ce que la mort devienne la seule lumière possible. Nick Tosches est un écrivain extraordinaire."
Hubert Selby Jr.

lundi 1 mars 2021

Festival international du film fantastique d'Avoriaz... Une fois pour toutes !

Je suis né avec le festival d'Avoriaz (1973), j'ai grandi avec, je lisais Mad Movies, je voyais tous les films quand ils sortaient. J'ai suivi l'aventure jusqu'au bout (1993, dernière édition) et suis toujours resté fasciné par ce festival que Gerardmer n'a jamais su remplacer dans mon coeur.

Le moment est venu. J'ai le recul nécessaire pour dire ce que furent les bons palmarès et les gros ratés ! Je vais tâcher de retenir mes 16 films préférés sur l'ensemble des festivals de 1973 à 1993 en vous disant mes déceptions, mes joies aussi, 20 ans de bonheur, et de lancer mes 8e de finale d'un tournoi qui aura pour lourde responsabilité de d'élire le GRAND PRIX DES GRAND PRIX d'AVORIAZ 

Je vais tâcher de vous remettre les Bandes Annonces des 16 films (en jaune ma sélection finale)  plus bas histoire de bien se rafraîchir la mémoire.

Vous êtes prêts ? Allons-y :

1973 DuelLa baie sanglante. L'abominable Dr Phibes.

Le Grand Prix accordé à Duel est mérité. Légitime. Même si j'ai une tendresse pour le Mario Bava qui m'a durablement impressionné. Le film de Steven Spielberg est une référence horrifique en soi. presqu'une parabole philosophique sur les "ambitions" surhumaines de l'homme, Une version motorisée d'Icare, le rappel à l'humilité face à ce qui nous dépasse. Ce camion sans visage, c'est l'image projetée de la mort, de la fatalité, du temps qui passe et que la vitesse d'un bolide ne rattrape jamais. C'est aussi un défi technique, il met en lumière la force d'un décor (ici de western mais de film post apocalyptique... Mad Max avant l'heure). Un scénario évidemment intemporel et génial. Il n'y a guère que Richard Matheson qui puisse à l'époque accoucher d'un telle merveille, brute, épurée, comme le squelette intact d'un véhicule, d'une idée de scénario... Et puis, le temps viendra se faire juge pour témoigner du génie de cet attelage divin Spielberg / Matheson.               

1974 Soleil vert. El Topo. Mondwest.

J'aime bien Mondwest come j'apprécie Crichton mais le film est bancal. El Topo est culte mais il lui manque quelque chose pour toucher le plus grand nombre. Soleil Vert est une excellent film d'anticipation qui préfigure le monde d'aujourd'hui. Il était visionnaire et légitime à recevoir le grand prix même si son discours politique, sa réflexion écologique l'éloigne des domaines de la peur et de l'épouvante qui restent l'ADN profond, indélébile de ce festival...     

1975 Phantom of the paradisePhase 4. It's alive ! 


1975 est un grand cru. Phase IV est imparfait mais il contient des morceaux d'anthologie. Et Saul Bass est trop rare pour ne pas être salué lorsqu'il officie à la réalisation comme ici. It's Alive ! est le fait du créateur de la fantastique série les Envahisseurs. J'ai une tendresse pour Larry Cohen son Epouvante sur New-York ou Meurtres sous contrôle. It's alive ! est l'une de ses grandes réussites (Cronenberg prolonge cette thématique et s'en inspire sûrement pour Chromosome 3) mais il ne tient pas la distance face au mémorable Phantom of the Paradise. qui mérite amplement son Grand Prix tant pour sa force singulière de l'oeuvre que l'hommage que De Palma y rend à tout un pan de la littérature fantastique et de genre. et je ne parle pas de la Bande originale qui est l'une des plus fabuleuses, audacieuses de toute l'histoire du Cinéma.      

1976 Massacre à la tronçonneuse. Frissons.

Voilà selon moi un premier raté. Tobe Hooper méritait amplement le Grand Prix qui n'a d'ailleurs pas été décerné. Un simple prix de la critique reçu... C'est trop peu. Que Paso? Quelle raison improbable a fait que son chef d'oeuvre n'ait pas tout emporté sur son passage ? Il est en tout cas dans mes 8èmes de finale. Y a pas moyen autrement. Je rappelle que cette année-là était projeté hors compétition un autre film hors normes et cultissime, The Rocky Horror Picture Show. Frissons de Cronenberg aurait aussi sûrement mérité quelque chose... Mais on ne refait pas l'histoire.

1977 Carrie. Les révoltés de l'an 2000.


J'adore les Révoltés de l'an 2000... Le danger vient de la jeunesse qui s'organise pour méticuleusement se débarrasser de toutes celles et tous ceux qui ont franchi leur date limite de consommation... Trop vieux = péremption direct ! Mais que faire face à Carrie qui fait partie de ce que Stephen King et Brian De Palma ont créé de plus puissant à l'écran. Président du Jury cette année-là... Un certain Steven Spielberg :)    

1978 Eraserhead. Cercle infernal. La dernière vague. Crocodile de la mort.

1978 est une année où David Lynch aurait probablement mérité de se démarquer déjà avec son Eraserhead certes étrange et obscur mais emblématique de tout ce qui suivra... Je dois découvrir Le cercle infernal qui curieusement est un film un peu oublié... En tout cas, président William Friedkin cette année-là et donc je me dis que ce film doit valoir le détour.  

1979 Halloween. Une année folle, exceptionnelle avec des perles à mes yeux que sont Phantasm (Don Coscarelli). L'invasion des profanateurs (remake brillant de Philip Kaufman). Tourist Trap (David Schmoeller). Je dois voir Long Weekend et Patrick (Richard Franklin) que je ne connais pas.

Mais tout de même, comment Halloween n'a-t-il pas reçu le grand prix cette année-là ???? Incompréhensible à mes yeux.

1980 Mad Max. Terreur sur la ligne. Fog. Là encore, Mad Max aurait mérité l'écrin Avoriaz pour être découvert... Le film de Georges Miller a tellement essaimé par la suite qu'il se devait de mieux figurer au palmarès par ailleurs assez quelconque.  A noter la projection Hors Compétition du Seigneur des Anneaux de Ralph Bakshi.


1981 Elephant Man. Fondu au noir. Hurlements. Vendredi 13.


Une année qui marque logiquement l'avènement de David Lynch même si je pense qu'Hurlements (qui a également plutôt bien vieilli) était une vraie incursion singulière, réussie et audacieuse dans le genre horrifique qui colle d'ailleurs mieux à l'esprit sombre et parfois gore du Festival. Éléphant Man sied mieux à des festivals Comme Berlin où Cannes. 


1982 Mad Max 2. Wolfen. Looker. L'incroyable alligator.

1983 Dark Crystal. Le dernier combat

1984 Le Quatrième homme Dead Zone. L'ascenseur. Brainstorm. Christine.

Une super année. Mais Paul Verhoeven mec Paul Verhoeven ! C'était l'occase de célébrer son immense talent ! Film énorme qui plus est ! Que n'a-t-on pas célébré le démentiel Quatrième Homme


1985 Terminator. Les griffes de la nuit. La compagnie des loups. les démons du Maïs. Razorback


Là encore, super année et logiquement James Cameron et Wes Craven arrivent en tête. 2 grands films, 2 franchises à naître.

1986 Link. Re-Animator. Vampire vous avez dit vampire ? Contact mortel. Dream Lover.

100 fois Link plutôt que Dream Lover. Qui se souvient de Dream Lover ? Un film très quelconque de Pakula. J'avais adoré aussi Fright Night, fabuleuse série B horrifique truffée d'humour et de références. Mais pas assez puissant pour être dans les 16.   


1987 Blue Velvet. La Mouche. Bloody Bird. L'amie mortelle.


Lynch encore et Cronenberg au top avec ces deux très grands films. Même si Blue Velvet s'inscrit davantage dans le registre du film noir.

1988 Robocop Au frontières de l'aube. Histoire de fantôme chinois. Hidden. Prince des ténèbres.

Paul Verhoven bis repetita. Cet homme aurait dû être célébré pour la 2ème fois... Robocop c'est quand même un sommet.


1989 Faux Semblants Incidents de parcours. Jeu d'enfant. Parents. Invasion LA.


Faux Semblants, immense oeuvre de Cronenberg et Grand prix mérité. 

Après 1989 ça faiblit côté sélections, quelques curiosités comme le Society de Yuzna ou Le sous-sol de la peur de Craven... Mais pas de quoi fouetter un chat.

1990 Society Lectures diaboliques

1991 L'échelle de Jacob.

1992 Le sous-sol de la peur.

1993 Braindead

Voilà. prochaine étape, je sélectionne mes 16 films préférés à Avoriaz. Je vais maintenant tirer au sort mes 8ème de finale et on ira par votes successifs jusqu'à élire le GRAND PRIX DES GRANDS PRIX. Chiche ?

Les voici :


Phantom of the Paradise Vs Elephant Man

Terminatior Vs Duel

Robocop Vs Nightmare on Elm Street 

Halloween Vs Hurlements

Link Vs Le 4ème Homme

Blue velvet Vs Carrie

Massacre à la tronçonneuse Vs Faux Semblants

Mad Max Vs La Mouche


Ce qui donne pour mois les 1/4 de finale suivants :

Phantom of the Paradise Vs Duel

Nightmare on Elm Street Vs Halloween 

Le 4ème Homme Vs Carrie

Massacre à la trançonneuse Vs La Mouche


Puis arrivent les 1/2 finales forcément serrées...

Duel Vs Halloween

Carrie Vs Massacre à la tronçonneuse 


Je ne vois dès lors qu'une finale des finales 

Halloween Vs Massacre à la tronçonneuse


Et là franchement... comment trancher ?

Mais je crois que mon coeur basculera in extremis vers Halloween.

J' y reviendrai !