vendredi 19 avril 2024

It Follows


La dernière image ? La vie dans l'habitacle traversant des quartiers comme on en trouve à Haddonfield  dans Halloween. On the Road. L'esprit du road movie. La beat Generation version série B. J'aime beaucoup ces désamorçages, ces respirations dans le film. La  bande de copains soudée (esprit Breakfast Club) dans la voiture et qui file vers son destin. La musique est également raccord, envoûtante mais inquiétante. Toujours ! 

Dans l'ensemble, je trouve l'idée d'It Follows intéressante surtout pour son esprit Sundance, très film indépendant américain qui viendrait se télescoper avec le genre matriciel horrifique (l'une des références centrales qui apparaît rapidement est The Entity aka Emprise de Sidney J Furie).

Côté genre précisément, je salue la séquence d'introduction (d'exposition) plutôt réussie. Car elle installe bien la peur et démontre l'horreur qui peut se faire jour et découler de ces rencontres "post coïtum animal triste".     

Ce qui me laisse perplexe c'est d'abord cette idée que le mal se transmettrait sexuellement. Point de départ pas inintéressant mais sous exploitée à mon sens ou alors aurait-il fallu jouer davantage la carte du second degré. Certes, on comprend bien les intentions au coeur des références, des Griffes de la nuit à Carrie en passant par Halloween... Tant que tu es "vierge"  tu ne risques rien nous murmurent ces oeuvres. Dès que les premières règles et l'âge adulte arrivent (Carrie) le péché est en toi... Métaphore éternelle des métamorphoses adolescentes qui font le deuil de l'enfant que nous fumes. Mais cela doit justement fonctionner comme métaphore et pas comme pillier narratif de l'intrigue. Ca crée une confusion malvenue : Pour me sauver, je vais devoir refiler ma maladie "honteuse" à ces petits cons sur un bateau là-bas... Ah bon ? Malsain oui. Sauf à manier l'outrance et l'ironie. Ce qui n'est jamais le cas ici. Première grosse faute de goût à mes yeux.

Par ailleurs, cette idée d'une entité qui vous poursuit quelle que soit sa nature (surnaturel, SF...) est divinement traitée dans Terminator (c'est un peu une Sarah Connor cette héroïne) ou dans Les Griffes de la Nuit : Ne t'endors pas sinon Freddy Krueger viendra te chercher... Voire dans Halloween Michael Myers est précisément décrit comme un fantôme à chaque coin de rue et qui pourrait bien (au moins au début) n'exister que dans la tête de Laurie Strode. Je trouve que dans chacun de ces univers (même s'ils sont tous différents) on sent à chaque fois une volonté de maintenir une intensité et une cohérence, un jusqu'auboutisme qui force l'admiration et n'en rend que plus mémorable la traque infernale. Or ici, passée l'installation qui intrigue, la deuxième partie, en gros à partir de la séquence de la plage, bascule dans quelque chose de différent, dans des univers qui finissent par affadir le propos et surtout faire perdre en crédibilité le postulat de départ. Ca tatônne, ça finit par "se chercher" quelque part entre Le sixième sens (elle est d'abord la seule à voir arriver ces Candyman aussi dérangeants qu'un moustique au moment de s'endormir), Ring (la malédiction vient sur toi parce que tu as regardé la cassette maudite) voire L'homme invisible (les autres ne voient pas l'entité mais voient les objets bouger autour etc). Gloubiboulguesque !

Si on rajoute l'idée farfelue que ces esprits ne feraient que marcher (ah bon ? wtf ?) comme dans un bon vieux film de Zombie, arpentant bêtement le macadam sans jamais pouvoir traverser les murs ni se téléporter... On se dit que trop c'est trop. Quant à la séquence finale dans la piscine, elle n'arrange pas les choses (revoir l'incroyable séquence de piscine de Morse pour s'en convaincre). Tout y devient premier degré, l'entité peut être éliminée, électrocutée, transpercée, recouverte avec un drap, ligotée, noyée, rasée, enduite de goudrons et de plumes... Du grand guignol ! Ce dérapage a commencé sur la plage où tous voient bien les cheveux de l'héroïne se dresser tout seuls sur sa tête... Elle s'enfile ensuite un champ de maïs, s'évanouit. Mais l'entité, elle, se sera perdue en route... Entre cette séquence et celle de l'hôpital, personne n'aura rien filmé, personne n'aura essayé de contacter les parents ou de se rendre à la police pour leur expliquer les choses forts d'un discours collectif convaincant et d'indices qu'ils ont pu réunir après la rencontre avec la victime "n-1". Bref, dès lors, dans un tel contexte, ça ne fonctionne plus. On n'y croit plus.

Voilà pourquoi je retiens de ce film le style, l'image, l'élégance, l'ambiance. Pour le renouvellement d'un genre, on repassera. Beaucoup trop de références qui partent dans tous les sens et mal digérées donc mal restituées.

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