samedi 29 janvier 2022

Drunk

 

La dernière image ? Forcément ce final éblouissant, ce passage de comédie musicale, Glou Glou Land sur un quai où toutes les jeunesses présentes et passées communient dans un même élan vital. 20 ans, 50 ans, même combat. Continuer d'exulter. De célébrer la vie tant qu'elle est là. Tant que c'est possible    

Quelques défauts bien sûr. La décision de faire cette expérience entre vieux copains est prise de façon bien trop rapide et coordonnée (un petit repas et vogue la galère). La dérive excessive vers le "no limit" l'est tout autant. Trop brutale à mon sens. Globalement, les copains qui picolent, déjà vu. L'alcool comme exutoire. L'alcool triste pour certains, par moments. L'alcool gai par une belle journée d'été. Le contrôle puis les excès. Enfin l'inévitable deuil. Chacun n'étant pas égal (physiquement, psychiquement) devant la boisson.

On pourrait penser à la Grande Bouffe. Mais chez Ferreri, il y a vraiment la recherche existentielle du panache ultime pour éviter les humiliations de la vieillesse, de celle qui vous dit tout bas qu'il est temps de se barrer avant que l'entourage n'ait celui de vous remettre des couches XXL... On y recherche le suicide par les voies les plus sympathiques qui soient, les plaisirs de la table. Le regard acide est aussi un jugement sans concessions sur nos sociétés de consommation déjà à l'oeuvre. A l'époque, mourir de ses propres gavages.

Dans Drunk on est davantage dans le Cercle des poètes disparus (la transmission de valeurs, d'usages, qui peuvent heurter la morale mais aider concrètement un jeune étudiant trop émotif par exemple). Avec en  filigrane ces copains qui sentent le temps les rattraper, la sagesse de la vie de famille les chloroformer peu à peu, d'où cette recherche compulsive pour revivre leurs années de feu. Le caractère flamboyant de la scène finale vient confirmer cela. Eux se fondant harmonieusement parmi leurs élèves, riant, communiant...  La joie revenue sur leurs visages soudain juvéniles et surtout cette jeunesse retrouvée dans leurs corps soudain souples et vivants, de fringants roseaux comme aux grandes heures de leur pleine vitalité.  C'est émouvant, lumineux. On y loue le bon côté de l'alcool qui grise, qui libère les énergies positives, recrée le lien tactile. Au diable les pudeurs.

Le film est pour toutes ces raisons toujours sympathique, souvent émouvant, mais pas exempt de vilains défauts (les ellipses en matière de dépendance ne sont pas les bienvenues, c'est justement l'invisible engrenage qui mérite une attention toute particulière pour essayer de comprendre...). A retenir surtout un acteur magnifique. Mads Mikkelsen. Toutes les nuances des sentiments humains passent dans son regard. De l'homme éteint, sacrifié, sans ressort du début, puis en colère, à celui de la séquence finale qui revit, exulte, qui est là. Rien que pour lui, il faut voir Drunk qui enchante même le jour d'un enterrement, même au coeur du désespoir masculin que le film ausculte sans fard à l'approche des derniers chapitres de nos vies.





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