Un
film de guerre au déplacement fastidieux, bruyant comme depuis l’intérieur d’un
char. La lourdeur et les grincements de chaque roulis sont perceptibles jusque
dans les dialogues et la structure même du film. On appelle ça de la grosse
ficelle ou du roulage de mécanique sans une once de finesse. Bon
il faut dire pour commencer que coté char Kevin Reynolds est passé par
là avec son très beau La Bête de guerre. Côté claustro. Wolfgang
Petersen est également passé par là avec sa référence sous-marine Das
Boot.
Mais
alors, que reste-t-il au juste ? De la suie et des costumes souillés, une
couleur marron virant au Sepia, des cigarettes sans filtre, tous les
ingrédients pour une pub Chevignon années 80, ou pour un Whisky
irlandais, voire pour des Lucky Strike. Les
dialogues d’une pauvreté rare ne viennent jamais racheter une intrigue qui
ressemble fort au rite de passage à l’âge adulte d’un « bleu bite »
sous l’égide du grand et beau manitou qui l’initie tour à tour à la mort, aux
femmes, au serrage de dents courageux, au sens du devoir désintéressé, au rire
gras… Le
sommet du ridicule est atteint avec cette scène où Brad Pitt torse nu
engage son jeune disciple à batifoler dans une chambre avec une jeune allemande
d’où cette dernière ressort la banane et le sourire aux lèvres. C’est à cet
instant que l’on comprend : Fury a été écrit par des ados
boutonneux. La
musique omniprésente n’arrange rien et le combat final échappe à tout réalisme.
On serait plutôt dans une parodie de Portés Disparus 2, Des
centaines d’allemands se font zigouiller par une seule balle (traçante ?) et
cinq hommes. Alors que pour faire tomber le seul Brad Pitt, il faudra
pas moins de 5 coups tirés depuis l’arme de poing d’un sniper puis au moins 2
grenades à bout portant ! Consternant. Comme l’esprit d’équipe affiché par
les 5 collègues filmés comme le 5 majeur d’une Equipe de Basket US qui se
prépare au dernier quart temps décisif dans les vestiaires. Viril et idiot.
La
seule scène à sauver est celle de 2 chars se tirant la bourre dans une morne
plaine. On est alors quelque part entre Duel (l’adversaire filmé comme un
monstre animé d’une vie propre) et l’abordage d’un Master And Commander
mais sans navires et sur un océan de boue. Enfin,
côté horreur de la guerre on n’est pas en reste, mais franchement je recommande
plutôt le modeste et fauché Rambo (dernier volet) qui jouait de façon
plus explicite la carte du « film de guerre qui est aussi un film
d’horreur » et vice versa. Cette violence était intelligemment rachetée
par la figure de Rambo, subtil prétexte à créer une fiction du réel dans ce qu'il a de pire. Avec la distance qui sied en pareil cas. Alors que dans Fury, à force de jouer la carte du réalisme boueux et
rouillé, on finit par se demander s’il n’y a pas derrière ces explosions de
tête un chouia de complaisance malvenue…
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