dimanche 14 janvier 2024

Sans Filtre (Triangle of sadness)

La dernière image ? Evidemment tout le segment sur le mal de mer en mangeant des mets raffinés où le capitaine acroc aux burgers s'improvise animateur radio sur un campus étudiant - son rêve de toujours ?

Pour le reste, Palme d'or encore incompréhensible (comme à mon sens pour Titane et Parasite qui étaient déjà assez médiocres). Le meilleur est au commencement, la séquence d'intro avec les éphèbes franchement réussie. Toute la scène du restaurant divinement jouée, savoureusement dialoguée. Enfin la croisière assez joussive jusqu'à la tempête. De super idées ici et là et il est appréciable de se dire que la filiation de ce film est plus que jamais du côté de Blake Edwards (The Party) ou Dino Risi (Les Monstres) avec toujours cette idée de nous tendre un miroir plutôt fidèle de notre monde et de ses petites monstruosités. S'agissant de The Party il y a bien plus qu'une inspiration, il en va carrément de la citation à tout va : les toilettes qui débordent, le micro dont le son se répand partout (le syndrôme "birdy nam nam"), la folie qui contamine ce petit monde flottant loin des réalités...

On pourra regretter malgré l'efficacité de cette première moitié de film le manque de crédibilité qui affaiblit toute la deuxième partie : on abandonne les personnages qui un temps nous ont intéressés (le jeune couple mannequin + influençeuse), personne lorsque tout devient chaos n'a le réflexe d'essayer de contacter la terre ferme, la famille, les amis, les clients, les banquiers, personne ne prie son Dieu, tout un pan de possibilités forcément drôles. Tout reste dans l'ordre de la surperficialité sans jamais chercher un peu de crédibilité qui permettrait de rester accroché au récit... D'ailleurs les 2 premières séquences étaient justement réussies parce qu'elles sonnaient vrai. Ces entretiens, ce restaurant... Dès lors que sur le bateau, tout part en sucette (en fait dès lors qu'une cliente impose au personnel de sauter à l'eau, idée marrante mais qui fait décrocher le spectateur parce ça n'arrive jamais un truc pareil).  

Ce qui fait qu'on passe trop vite aux terroristes décrits en passant comme des pieds nickelés (esprit Tintin, idée assez moyenne dans le contexte actuel avec le terroriste survivant sympathique) et encore plus vite sur l'arrivée aux abords d'une île où l'on est presque dans la configuration du début d'un nouveau film. Et là, ça ne fonctionnne absolument plus... On comprend l'idée (de prendre les festivaliers de la haute et les mettre dans une configuration Koh Lanta à devoir faire du feu, tuer un âne à coups de pierre ou nettoyer un poulpe) mais cela reste trop binaire. Par ailleurs, toute l'histoire de la société qui se redéfinit en fonction des mérites des uns et des autres (le matriarcat en marche, la critique sans finesse du capitalisme et de ses méfaits) est tout aussi lourdingue avec le tunnel sur les sempiternels rapports sexuels qui en découlent etc. Très bof et surtout plus crédible du tout... C'est peut-être là que le film aurait gagné à prendre de l'épaisseur, à se dramatiser brutalement en s'intéressant vraiment aux personnages, en les creusant, en fouillant leur humanité...

C'est donc pour finir une vraie déception dont on garde le net sentiment qu'il est davantage un film-sketch, un peu gadget malgré les très bons passages du début par ci par là jusqu'au naufrage... Un auto-sabotage !

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