mercredi 16 février 2022

Dune

La dernière image ? Les séquences de télépathie meurtrière dans la libellule qui permettent au fils et à sa mère de s'en sortir alors qu'ils sont pris au piège... Ce passage est assez saisissant et réussi. Ou comment retourner l'esprit de ses adversaires contre eux-mêmes.      

Le cinéma de Denis Villeneuve ne m'a jamais convaincu et ça ne commencera pas avec Dune. Ici tout est normalement question de faire ressentir, de créer une connexion (une forme de télépathie ?) entre le spectateur et l'univers du film comme entre une mère et son fils, comme entre le présent du héros et son futur en gestation... Mais ce miracle hélas n'arrive jamais. Exemple emblématique :  des visions précoces du héros à sa première rencontre avec sa femme des sables, le spectateur que je suis reste de glace et la fameuse rencontre lorsqu'elle finit par avoir lieu accouche d'une souris... Un comble !

Il y a probablement une première raison à cela qui dédouane le réalisateur : l'oeuvre originale qui est selon moi "datée". Je pense à ces pratiques familières d'un autre temps comme ces textes lus par des orateurs sur des parchemins (mais que vient faire le papier dans un monde où technologie et télépathie sont à leur apogée ?). Je pense aussi à ces pactes scellés par des sceaux à la cire.... Mélange pas heureux d'époques et de coutumes... L'oeuvre est par ailleurs prise un peu trop au pied de la lettre par Denis Villeneuve. Car l'impression qui domine est de voir se déployer à l'écran une sorte de pseudo Lawrence d'Arabie (L'aristo de service devient l'élu et le chef d'une horde de bédouins, de touaregs prêts à donner leur vie face à l'envahisseur) luttant pour des opprimés dans une métaphore filée bien lourde. Les épices (ressources naturelles dont regorgent les sols de cette planète) font l'objet des convoitises de multinationales obsédées par le profit se faisant du blé sur le dos et les vies de ces malheureux autochtones. D'où mon constat sans appel : Dune a irrémédiablement vieilli. Lynch était d'ailleurs malgré un résultat décevant parvenu à mettre son grain de folie, son univers bien à lui dans l'adaptation de Dune quand Denis Villeneuve n'apporte aucune magie personnelle et se contente d'exposer de façon très scolaire. D'où une forme léthargique et monochrome (j'avais le souvenir de couleurs et de contrastes beaucoup plus vifs et tranchés chez Lynch), avec la curieuse impression d'entrer dans un monde en 2 dimensions : une histoire qui se déroule de façon prévisible. Aucun développement de ce genre initiatique ne nous est d'ailleurs épargné : Le combat d'intronisation dans la horde des sables pauvrement filmé.  Impossible de rêver, de s'évader... Revoyons Brazil toutes affaires cessantes. La matière du film devrait être une matière à rêver. Tout ici est pourtant étrangement linéaire, démonstratif, explicatif, bavard, je retrouve au passage les incommensurables défauts d'un Game of Thrones où ça bavassait interminablement pour peaufiner des trahisons en escadrille...

Le côté grandiose et complexe (seulement en apparence) de toutes ces manigances au sommet finit éparpillé comme un château de cartes par le déclenchement d'une guerre à travers la seule trouvaille scénaristique qu'ait trouvé l'auteur : une simple menace sur la vie de la femme du médecin de famille... Difficile de faire plus trivial. Faut le faire quand on voit de quelle façon la peur et la fidélité sont par exemple testées sur le héros, mises à l'épreuve, lorsque sa main glisse dans une boîte étrange, réceptacle de toutes les peurs... Ils sont tous télépathes mais le coup de l'odieux chantage, personne ne l'a vu venir... Bref tout est trop fragile sur le plan de l'intrigue et trop platement apprêté, exposé à l'écran.. Je m'attendais à rêver, Et bien le rêve on l'attendra... 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire