samedi 30 janvier 2021

The Party dans un Aquarium

 

Zeli est un petit poisson rouge qui a mystérieusement commis l'irréparable en quittant son aquarium un lendemain d'anniversaire. La faute  pensai-je alors à de trop nombreuses petites mains (celles des copines d'anniversaire de Nahia) ayant essayé de l'attraper agitant son milieu naturel de façon peu respectueuse. Violence d'une intrusion mal vécue dans un chez soi jusque là doux, confortable et molletonné.

La vie de Zeli fut trop courte et nous ne l'oublierons pas. Je repense à elle notamment chaque fois qu' Aquarium de Saint Saens résonne (c'est ce qu'on lui faisait écouter le soir pour l'endormir).   


Et forcément, lorsque j'entends Saint Saens, je pense aussi au Festival de Cannes...

Il est devenu (c'est mon avis, ne l'a-t-il pas toujours été ?) ce lieu étrange, fermé de l'intérieur, capitonné, replié sur lui-même où s'entrechoquent des OOOooh et des AAAaah d'admiration devant des films qui se disent ou se veulent engagés, portés qu'ils sont par des réalisateurs qui entendent s'emparer de causes noblement estampillées, qui veulent dénoncer les maux de notre époque.

Mais pourquoi le faire avec autant d'apparats, de codes vestimentaires, de reines apparences ? Pourquoi se congratuler dans les mêmes tenues glaçantes et condescendantes que portent les invités d'ambassade de France en Afrique sub-saharienne depuis une époque antérieure aux indépendances... Les relents de la vieille puissance coloniale seraient donc toujours à l'oeuvre ? Elles ont la vie dure. Protocolaire, cynique, apprêté, le regard de ces prétendues élites sur le monde d'aujourd'hui fait mal aux yeux.

Il y a je trouve un décalage entre le faste, le clinquant, le côté désuet de l'événement d'un côté, l'urgence des sujets abordés de l'autre. Ce paradoxe crée une forme d'indécence qui désormais me gêne.

L'opulence face au reste du monde, la tenue de bal photographiée n'appelle chez moi que le voeu d'une transformation prochaine en citrouille de carnaval (au sens le plus festif du terme). Car je repense ému à la partie Africaine du Voyage au bout de la nuit et me rappelle quel visionnaire Céline fut, imaginant au passage quelle sorte de tribune il eut été capable de produire de son vivant au sujet de ce non-sens de festival, aussi figé dans ses certitudes que le rire de stars qui parfois n'ont plus d'âge...

Remplaçons le tapis rouge par des faux-nez de la même couleur, remplaçons l'esprit de sérieux par la farce, par un regard amusé sur le monde mais d'abord sur soi-même... Retrouvons l'enfance de l'art, la capacité d'émerveillement indissociable de l'humilité, de l'humour et de l'auto-dérision... On en est bien loin !

C'est pourquoi revoir The Party (et Peter Sellers) fait toujours du bien...  Il ne raconte au fond rien d'autre. Cannes, c'est cette soirée aseptisée, c'est cet entre soi, et pour  remettre un peu de vie, il faut  apporter sa différence, y rester soi-même, refuser de se fondre dans le moule, on vous le fera peut-être payer mais vous aurez apporté la mousse et l"éléphant rose qui redonnent au 7ème art sa raison d'être... Un lieu de transgression avant tout. Un lieu pour faire réfléchir sans se prendre la tête. Un lieu pour célébrer les éternels "apprentis" que sont les artistes et pour dérider les autoproclamés "experts" du cinéma, les ramener à plus de légèreté, d'humilité, seul vrai terreau fertile de toute forme de création... 




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