jeudi 21 janvier 2021

L'affiche de film, objet d'art

A Saint-Germain-en-Laye dans les années 80, l'internat du lycée Marcel Roby avait de quoi effrayer les plus douillets, toutes celles et tous ceux qui rentraient chez eux le midi, qui de retour à la maison, avaient droit à leurs papouilles, à leur bol de chocolat chaud, à leurs petits biscuits chaque soir après l'école.

Non, l'internat, pour tous ceux-là, c'était un avant-goût de sécheresse et de purgatoire, un long corridor de cauchemar parsemé à intervalles réguliers de cloaques de 5 mètres carrés isolées du couloir central par un bon vieux rideau marron suspendu à des tringles aussi bruyantes qu'usées. Uniformité du lieu. Monotonie des lignes de fuite. Difficile de distinguer un boxe de tous les autres si ce n'était par le chiffre magique figurant bien en évidence au-dessus, comme un numéro de cellule.

Il ne restait pour sauver son âme qu'à privatiser le lieu. Mon salut vint d'une idée simple : noircir les murs d'affiches de films d'horreur qui m'avaient fasciné : Fright NightLa baie sanglante, Profondo RossoDawn of the Dead donnant à mon petit box sweet box des allures de sanctuaire.












J'ai parfois la nostalgie de cette époque surtout quand je constate avec tristesse ce que les affiches de film sont devenues... Elles ne veulent plus rien dire, n'apportent aucune valeur ajoutée, n'existent plus pour elles-mêmes parce qu'elles sont hélas devenues des éléments du "print" et de la communication du film, un produit de placement, d'appel, avant la sortie salle ou DVD.

C'est pourquoi j'ai un temps pensé à créer une structure qui permettrait de retrouver la grâce de ces affiches d'antan, qui dès Les visiteurs du soir (Marcel Carné) étaient des objets en soi qui avaient leur vie propre, des histoires singulières qui pouvaient dès lors s'écrire hors des films dont ils étaient pourtant l'illustration, la signature.





Dans mon esprit, le principe était simple : Bosser avec des dessinateurs, des artistes-peintres, pour créer des affiches de film en y intégrant une part non négligeable de supplément d'âme, de modernité. En faire autant d'objets d'art, cultes, signés, ayant une valeur affective bien sûr, mais pas seulement. Puisque c'était aussi le moyen le plus sûr de re-créer de la valeur dans une chaîne où l'essentiel me semblait avoir été oublié en chemin.

L'industrie du 7ème art aurait tout intérêt aujourd'hui à reconstruire quelque chose autour de cette noble idée pour que les murs de nos chambres redeviennent des lieux de voyage vers ces contrées qui nous ont de tous temps fait rêver. 

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