mardi 2 juillet 2019

Le tailleur de Panama. John Boorman


Le résultat manque un peu de personnalité (surtout quand on connaît le génie visuel et musical de John Boorman). John Le Carré est d'ailleurs probablement pour beaucoup dans ce qui fait le sel de ce très intéressant Tailor of Panama.

Mais il reste que Pierce Brosnan a rarement été utilisé à contre emploi comme ici, que Geoffrey Rush confirme qu'il est le digne héritier de Peter Sellers (le temps d'un film), que Jamie Lee Curtis est aussi rare que j'ai de plaisir à la retrouver.

Et puis John Boorman a finalement le bon goût de s'aventurer dans un genre difficile à définir... On oscille entre comédie, satire politique, drame social, film d'espionnage... The Tailor of Panama est d'abord l'un des premiers films à  dépeindre si intelligemment la vie d'"expatriés" dont les centres d'intérêt varient à la marge (les soirées mondaines, le sexe, l'argent, les intrigues, les coulisses du pouvoir). Un monde d'apparat, de faux semblants où chaque expatrié peut dissimuler une vie antérieure peu glorieuse, des intentions peu louables... C'est pourquoi le film se présente rapidement comme la version la plus réaliste qui soit d'une aventure de James Bond... Pierce Brosnan (pas choisi par hasard) y dévoile ce qui pourrait bien être le vrai visage des espions occidentaux se révélant de véritables manipulateurs, capables de briller en société, de nourrir des intrigues à partir de rien, de vide intersidéral, créant de toutes pièces des informations confidentielles pour arriver cyniquement à leurs fins... Un prestidigitateur doublé d'un incorrigible érotomane. Voilà son personnage qui vit d'addictions en tous genres l'amenant par ondes de choc successives à provoquer sur un malentendu l'entrée en guerre d'une grande puissance et la mort d'innocents... C'est alors que le film devient un digne héritier de Docteur Folamour mais plus profond que son aîné : cette mélancolie qui baigne le film est possible grâce au personnage de Geoffrey Rush, à sa candeur, à son imparfaite humanité, à son idéalisme, à sa relation si singulière avec sa femme...

Voilà donc un film un peu convenu dans sa forme,  mais qui mérite amplement le détour pour ces quelques raisons, parvenant aisément à passer de la blague potache (la séquence dans un club homo) à des instants d'une noirceur insondable (le suicide de l'ami du tailleur). C'est toute la force et le prix de cet admirable Tailor of Panama.       



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