mardi 16 avril 2013

Spring Breakers. Ou comment toucher le fonds (de la piscine)


Je crois utile avant toute chose de voir ou revoir Another day in paradise (Larry ClarkLa balade sauvage (Terence Mallick), The honeymoon killers (Leonard Kastle) - qui abordèrent en leurs temps la thématique d'une jeunesse à la dérive, en mal d'idéaux et de modèles échouant fatalement dans une violence gratuite, aveuglée par de l'amour factice. C'est en les revoyant qu'on réalisera à quel point Spring Breakers est aussi creux et crétin que ses personnages.




L'argument selon lequel le film épouse la vacuité de personnages censés correspondre à une époque ne tient pas une seconde : je rappelle pour commencer que le Spring Break n'est qu'un passage ritualisé vers l'âge adulte comme il en existe dans toutes les sociétés depuis la nuit des temps. Rien de propre à notre époque. Je ne reviens pas sur nos chers bizutages, sur les beuveries organisées que sont les fêtes de la bière, de Bayonne... Tout est comme ici prétexte pour toutes les jeunesses du monde à se "mettre minable", à définitivement sortir de l'enfance... On peut donc participer à ce genre de parades monstrueuses hier comme aujourd'hui sans être réduits aux caricatures que sont ces 4 jeunes femmes (interchangeables et dont la psychologie tient honnêtement sur un ticket de métro, et encore je sus gentil...). 

Le deuxième argument qui veut que le film adopte une forme ouatée mais colorée, pétillante mais informe pour répondre à l'exigence posée par le rêve un flou de ces jeunes filles sans épaisseur, ne tient pas plus longtemps. Ce serait nous raconter par le menu, entre les lignes, que le rêve ultime et commun de ces 4 silhouettes serait d'aller butter le caïd du coin, soit... En termes de démonstration, on est plus très loin de la rédaction d'un élève de 3ème sur les dangers de la drogue et de la violence... Et je m'interroge : combien de filles, de femmes, ont aimé ce film ? Qu'est-ce qu'elles en disent au juste ? Je vois beaucoup de mecs sur les forums s'extasier devant ce ramassis de conneries. Mais de quoi rêvent les gonzesses de cet âge quand elles veulent s'émanciper ? De défonce, de baise... Peut-être. De braver des interdits, plus sûrement... Mais ces derniers prennent des formes multiples, infiniment plus nuancées que la seule et pauvre idée au risque d'enfoncer le clou que Spring Breakers essaye d'avancer (des filles venues faire la teuf se retrouvent embringuées dans des braquages, super !). Pauvre idée qui plus est d'une gigantesque facilité. Parce qu'au final, ce que je ressens derrière ce film c'est le délire d'un mec qui parti sur une idée de départ maigre comme un pitch trouvé un soir de biture s'est contenté de porter à l'écran ce même petit bout d'idée sans jamais rien développer, ou si peu... Ce qui donne aussi aux voix off (tout ça est un jeu video, maman je suis devenue une femme, je m'éclate, etc.) comme aux sons répétitifs d'armes qu'on enclenche, quelque chose de ridicule, d'artificiel, et au final de bêtement premier degré. 

On pourrait d'ailleurs ajouter que le final est d'une moralité pour le moins douteuse... Alors quoi, ces filles en maillots de bains ont buté comme dans un jeu video toute la mafia locale. et le dernier plan, positif, c'est cette voiture sur un bord de mer idyllique, pour raconter quoi au juste de cette épopée ? Qu'elle fut une odyssée merveilleuse ? C'est ce que les lumières et la musique suggèrent en tout cas. Intentions pas claires, pas le moins du monde...

C'est pourquoi je me répète : qu'on ne vienne pas me rétorquer que si Spring breakers est vide, si les dialogues sont pauvres, si l'ensemble est incurablement nullissime, c'est que c'est "fait exprès"... Quand on colle de trop près à son sujet (l'absolue bêtise d'une certaine jeunesse), le risque c'est d'en choper les symptômes. Le réalisateur s'est contaminé tout seul. Mais si ça peut le rassurer., il méprise à ce point ses personnages, les raconte avec si peu d'humour et tellement de prétention, qu'il ne doit pas s'étonner d'avoir accouché d'une bouse.

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