La dernière image ? Probablement cette séquence où le personnage en cavale coiffé d'une perruque marche sur un trottoir face caméra et se trouve rejoint dans son dos par deux hommes dont on pense d'abord qu'ils sont là pour le supprimer... Séquence très bien réalisée, maîtrisée comme l'est par exemple la (longue) séquence de la piscine à l'issue de laquelle le fugitif perçoit des regards soupçonneux se portant sur sa personne, les effets indélébiles de la paranoïa à l'oeuvre.
Bien sûr, cette tentative de voir la vie d'un homme se cachant, errant de planque en planque depuis les yeux, le regard de sa fille unique adorée a quelque chose d'intéressant, de touchant même. Il y va de la subjectivité du point de vue qui adoucit parfois, ramène de l'émotion, aborde le rapport universel père-fille, nous parle de la fatalité, de ce qu'on transmet malgré soi à ses enfants... Tout ça est fort louable.
Mais l'un des problèmes majeurs est que cette histoire n'a rien d'universel. La volonté d'humaniser un "lâche" (c'est à dire un homme qui a fait tous les mauvais choix dans sa vie et qui semble ne pas vouloir les assumer avec cette fuite en avant) après l'avoir décrit comme un père de famille comme les autres (présent et absent) avec les mêmes besoins (physiologiques), les mêmes petits problèmes du quotidien finit par donner au film l'impression qu'avait donné François Hollande en se décrivant comme un "président normal". On a du mal à souscrire. Il y a quelque chose qui se refuse à l'intelligence. Ce qu'on se dit surtout c'est que l'ordre des choses c'est qu'il périsse par le feu, que le malheur s'invite à sa table. Il n'y a pas de rédemption possible par ici... Noir c'est noir. Et le film est en cela terriblement monocorde et prévisible.
Et une fois ce postulat imposé d'homme après tout normal qui aime sa fille, le film déroule sa petite partition de façon implacable (de planque en planque, de fait divers en fait divers relaté par un poste de télévision, d'ami mort en ami mort assassiné), sans surprises, où le père plutôt que de tenir sa fille éloignée par précaution (dans un autre pays, finançant ses études coûteuses en appliquant les règles qui l'ont mis là où il est, dans un "poste" de décision) va la précipiter naturellement vers l'horreur la plus totale en la gardant près de lui. Dans un climat de retour éternel des mêmes choses. Il y a tout au long du film un truc lent, sourd et répétitif qui finit par lâcher le spectateur... Enfin qui m'a lâché moi. L'impression finalement que les personnages ne sont que des silhouettes avec (si) peu de marge de manoeuvre. Corseté ! (sans jeu de mot). Irrespirable. Et pour finir assez oubliable me concernant. J'ai attendu tout le film la remontée vers la surface, la prise d'air, mais hélas jusqu'au dernier plan, c'est encore la même musique. So what ? Le cinéma je crois a vocation à faire penser autrement, à donner des perspectives qui élèvent l'âme en donnant à réfléchir. Ou alors il fallait un documentaire choc sur le sujet.